Noël, une solennité qui marque l'entrée de Dieu dans l'histoire de la vie humaine

Publié le par Amédé ZOUNGRANA (1ère Année de Théologie)

Noël, une solennité qui marque l'entrée de Dieu dans l'histoire de la vie humaine

 

 

Homélie de Noël jour : Ac

(Is 52, 7-10 ; Ps 97 (98), 1.2-3ab, 3cd-4, 5-6 ; He 1, 1-6 ; Jn 1, 1-18)

 

Chers frères et sœurs, la nuit dernière, ceux qui étaient présents à la célébration de la Vigile de Noël ont été témoins de ce qui est advenu dans notre monde. De fait, nous étions tous rassemblés là-bas, dehors, dans la nuit semi-glacée de la Cité du Précurseur, avec nos vestes, nos manteaux, nos capuchons, attendant comme autrefois le peuple d’Israël une nouvelle, une Bonne Nouvelle, celle qui devait mettre fin à quatre semaines de marche, de veilles et d’attente ; une nouvelle qui devait bouleverser nos vies et changer le cours de l’histoire du monde. Cette Bonne Nouvelle a retenti au moment où la terre et le ciel se sont touchés, se sont croisés ; au moment où les ténèbres de la terre ont été illuminées par la lumière du ciel. Et c’est alors qu’unissant nos voix à celle des Anges, nous avons laissé éclater notre joie par cette hymne de louange : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ».

Oui chers amis, nous avions raison d’exulter, parce que dans cette nuit sainte, quand les ténèbres recouvraient encore la terre, la lumière a jailli, il est né, et il est venu parmi nous, celui que l’on appelle Emmanuel, c’est-à-dire Dieu-avec-nous. Oui, la lumière a brillé, mais comme à la première Noël, elle est certainement passée inaperçue aux yeux de beaucoup, pris dans les préparatifs de la fête ou occupés à autres choses. Aussi ce matin, ce matin de la Nativité, le temps est venu pour nous de nous éveiller, d’ouvrir nos yeux et nos oreilles pour contempler la création recréée et entendre le messager qui annonce la paix, la Bonne nouvelle et le salut. Et cette bonne nouvelle, la voici : Dieu s’est fait homme.

Chers amis, c’est la célébration de ce grand mystère du Dieu fait homme, du Verbe incarné qui nous rassemble ce matin dans la joie et les chants. Oui, nous sommes là pour célébrer Noël, cette solennité qui marque l’entrée de Dieu dans l’histoire, l’Éternel dans le temps, la lumière dans les ténèbres. Avec Noël, nous sommes plongés dans le mystère de la proximité du ciel qui se fait compagnon des faibles et des petits, afin de les élever au rang de la divinité. Nous comprenons alors pourquoi aujourd’hui, l’humanité ne peut que chanter, chanter et chanter la gloire de celui qui vient la restaurer et la rétablir dans sa beauté originelle.

Ref. : Gloire à Dieu dans le ciel, grande paix sur la terre  (bis).

Chers frères et sœurs, aujourd’hui nous proclamons la gloire de Dieu, parce qu’un enfant nous est né, un Fils nous a été donné. Oui, parler de Noël, c’est parler de naissance, de génération. Si la liturgie de la nuit nous a surtout fait voir des préparatifs de la naissance de Jésus, celle de ce matin, elle, nous instruit particulièrement sur l’identité du nouveau-né. Qui est cet enfant qui vient de naitre ? Chers amis, cette question n’est pas de trop. Elle mérite d’être posée. Car c’est sa réponse qui nous permettra de mesurer réellement la profondeur et la grandeur de l’événement qui nous rassemble ce matin.

Dans l’évangile de saint Jean, le nouveau-né est clairement identifié au Verbe de Dieu : « Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité ». Le nouveau-né, c’est donc le Fils unique du Père, et notre credo précise qu’il est Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu. Existant de toute éternité, il est le maitre d’œuvre de la création car tout a été fait par lui et rien ne subsiste en dehors de lui. De plus, remarquons que l’évangile de ce jour s’ouvre avec « les mêmes mots qui ouvrent la Bible dans le livre de la Genèse : ‘au commencement’ » : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre » (Gn 1, 1) ; « Au commencement était le Verbe » (Jn 1, 1).

Oui, chers amis, ce parallélisme nous fait comprendre que « le Dieu qui se fait homme est celui qui était là depuis la création. Oui, il n’y a pas un Dieu de l’AT et un Dieu du NT. Non, Dieu est Emmanuel, il est avec nous depuis l’origine, il est même celui qui nous a donné la vie et le monde … celui qui a accompagné l’homme dans son chemin d’humanisation, qui lui a donné la Loi et les prophètes pour le guider sur le chemin de la vie », vérité de foi que la deuxième lecture exprime en ces termes : « Dieu dans le passé a parlé à nos pères par les prophètes ; mais en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes choses et par qui il a créé les mondes ». Pour la lettre aux Hébreux, il n’y a pas de doute, le Verbe étant le rayonnement de la gloire de Dieu, l’expression parfaite de son être, il est Dieu comme lui. Chers frères et sœurs, vous l’avez bien compris, l’enfant qui vient de naitre, n’est pas n’importe quel enfant. Il se distingue des autres par son origine, son origine divine, car il est Dieu. Et c’est en tant que Dieu qu’il rend visite à l’humanité en prenant chair dans le sein de la Vierge Marie, scandale pour les païens, folie pour les philosophes.

De fait, quel est ce Dieu qui vient se confondre à sa création en épousant la nature de sa créature ? Disons simplement que du point de vue philosophique, l’incarnation du Verbe telle que nous la comprenons est une réalité impensable, une absurdité qui ne mérite pas la moindre attention. Mais heureusement, l’homme n’est pas que raison, il est aussi et avant tout un être religieux, quelqu’un qui ne se fie pas à sa seule intelligence, mais qui sait s’ouvrir à la transcendance. Et c’est justement dans cette ouverture qu’il découvre que son Dieu est infiniment grand et infiniment petit, un Dieu dont la puissance se déploie dans la faiblesse et dont la folie est plus sage que les hommes. Le mystère de l’incarnation, n’est-ce pas le déploiement de la puissance de Dieu dans la faiblesse ? « Lui de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes ».

Chers frères et sœurs, voilà ce dont est capable notre Dieu. Oui, passer de la grandeur à la petitesse, de la richesse à la pauvreté, de la gloire à l’humiliation, et vice versa fait partie de l’être même Dieu et nous en avons la preuve aujourd’hui. Et l’explication que nous pouvons donner à cette contradiction apparente en Dieu, c’est qu’en lui, toute-puissance et amour se conjugue dans un binôme unique et indissoluble. Dieu demeurera toujours le tout autre, l’infiniment grand mais son amour pour l’humanité le tiendra toujours proche de cette même humanité. « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné le Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne soit pas perdu, mais ait la vie éternelle », écrit l’évangéliste Jean. Oui, le Christ s’est incarné et est descendu du ciel « pour notre salut », mais ce qui est au fondement de ce grand mystère, c’est l’amour et rien que l’amour.

Ainsi donc, nous pouvons dire que l’amour est la seule raison pour laquelle Dieu s’est fait Enfant. En effet, il n’y a pas d’autres raisons plausibles qui puissent justifier le pèlerinage terrestre de Dieu avec nous. Alors chers frères et sœurs, si Noël est la preuve suprême de l’amour de Dieu pour les hommes, quel doit donc être notre réponse finale à Noël ? Ici, nous nous interrogeons sur la signification de Noël pour nous aujourd’hui.

Je le disais tantôt : parler de Noël, c’est parler de naissance. Oui, si le Christ est né à Bethléem, c’est pour que nous puissions naitre à notre tour. Lui qui est né en l’homme, veut qui nous naissions en Dieu. Saint Irénée exprime merveilleusement cette vérité en affirmant que « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu ». Et comment l’homme peut devenir Dieu s’il ne se met pas dans conditions pour le devenir ? « A tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu », avons-nous entendu dans l’évangile. Ainsi, pour naitre en Dieu, pour vivre de la vie nouvelle, de la vie divine qu’apporte l’Enfant de Bethléem, il faut avant tout l’accueillir, il faut croire en son nom. Et accueillir Jésus signifie le laisser prendre chair en nous comme il a pris chair dans le sein de la Vierge Marie.

En cette fête de Noël, Dieu veut réaliser en chacun de nous ce qu’il a réalisé en Marie au moment de l’annonciation. Il veut que nous concevions le Verbe de Dieu pour ensuite l’enfanter ? Et nous, sommes-nous prêts à dire comme Marie : « je suis la servante du Seigneur, que tout se passe pour moi selon ta parole ? ». Chers frères et sœurs, il faut le dire : la célébration de la Nativité, si elle veut être sincère oblige notre « fiat », car Jésus ne peut pas naitre véritablement dans le monde s’il ne nait pas dans nos cœurs. C’est donc à juste titre que la tradition chrétienne parle de deux naissances à Noël : l’incarnation du Verbe et la Parole de Jésus qui se fait chair dans la vie de chaque croyant.

Oui, chers amis, aujourd’hui, la Parole éternelle du Fils, devenue Parole de Jésus engendré dans l’Église, est offerte au monde. C’est cette parole de Jésus que nous sommes invités à accueillir dans notre vie pour qu’elle la transforme de l’intérieur et nous fasse devenir reflet et rayonnement de la lumière du Verbe éternel du Père. Devenus reflet et rayonnement de cette lumière, nous sortirons des ténèbres de nos angoisses, de nos craintes et de nos peurs pour éclairer le monde et donner à chaque homme de bonne volonté des raisons d’espérer.

Noël est le jour de l’émerveillement, de la gratitude et de l’espérance, le jour où celui qui a accueilli le Verbe de Dieu fait chair renait et peut faire renaitre en devant messager de la Bonne nouvelle du salut auprès de ceux qui souffrent, qui fuient la guerre ou la faim, de ceux qui sont seuls, petits ou malades. Chers frères et sœurs, devant le petit Jésus couché dans la crèche, nous engageons-nous à être ces messagers de la bonne nouvelle dont parle le prophète Isaïe dans la première lecture ?

Pour finir, je voudrais m’adresser un tout petit peu aux enfants comme l’a fait le diacre Pizengo dimanche dernier. Très souvent, nous oublions qu’ils sont là. Ils passent parfois même inaperçus comme le petit Jésus dans grotte de Bethléem. Mais aujourd’hui, c’est l’événement de la Nativité lui-même qui nous oblige à tenir compte d’eux. Alors chers enfants, est-ce que vous là ? Vous m’entendez ? Est-ce que vous êtes bien là ? Si vous êtes là, recevez nos souhaits de Joyeux Noël. Noël, c’est la fête des enfants. Elle est votre fête avant d’être la nôtre. Normalement, on devrait vous laisser la place aujourd’hui pour que vous nous parliez de l’enfant Jésus parce que vous êtes de la même génération. Vous le comprenez mieux que nous adultes. C’est pourquoi, je vous invite, une fois à la maison, à faire un peu de catéchèse à vos parents. Parlez-leur de Jésus. Dites-leur ce que Jésus petit enfant attend d’eux. Vous le savez autant que moi : lorsqu’on parle de Noël, on parle de beaucoup de choses : de l’étoile de Noël, de l’arbre de Noël, de la lumière de Noël, du repas de Noël etc. laquelle de ces choses voulez-vous être aujourd’hui ? Une étoile qui amène les autres à la rencontre du Nouveau-né ou un arbre qui abrite les laissés pour compte sous son ombre ? Une lumière qui illumine le chemin des autres ou un repas qui rassasie de pain et d’espérance le pauvre ? Chers enfants, chers frères et sœurs, vous l’avez bien compris, la célébration de la fête de Noël pour porter des fruits demande que nous devenions des messagers de la Bonne nouvelle du Salut. C’est pourquoi dans cette eucharistie, nous allons demander au Seigneur la grâce de pouvoir accueillir dans notre vie l’amour de Dieu incarné en Jésus-Christ pour être à notre tour débordants d’amour pour les autres.

Ref. : Ah qu’ils sont beaux sur la montagne, les pas de ceux qui portent la Bonne nouvelle

          qui annoncent le salut et la paix !

Ab. Antoine KYÉLEM

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article