Joyeux Noël !!!!!! Comment croire à l’amour de Dieu pour l’humanité et à sa promesse de paix quand nous sommes soumis à toute sorte d’épreuves dans la vie ?
HOMELIE DE LA NATIVITE DU SEIGNEUR/ NOEL NUIT
TEXTES DU JOUR : Is 9, 1-6 ; Ps 95 ; 2Tt 2, 11-14 ; Lc 2, 1-14
Frères et Sœurs, au moment où nous célébrons la fête de la Nativité du Christ, nous sommes habités par des sentiments contraires. D’un côté, nous sommes invités à la joie et à la fête. D’ailleurs autour de nous, nous voyons bien des gens qui n’ont plus aucune connaissance et aucun attachement à la personne de Jésus et qui pourtant se donnent beaucoup de mal et dépensent beaucoup d’argent pour que, au moins pendant quelques heures, la fête de Noël leur permette d’oublier la dureté des temps et les tristesses de leur vie. Les maquis, les restaurants, les réveillons en famille, leur tiennent lieu d’espérance. Pour nous, qui savons pourquoi cette nuit est une nuit d’allégresse, nous nous réjouissons en vérité de la naissance du Sauveur. Mais d’un autre côté, les difficultés présentes de l’histoire des hommes : les difficultés économiques, de santé, d’insécurité, des personnes déplacées, ne cessent d’être étalées dans nos informations quotidiennes. Elles provoquent chez nous une certaine gêne, comme si nous avions mauvaise conscience. Quand tant d’hommes souffrent, pouvons-nous nous laisser aller à la joie sans paraître insensibles à la misère de notre cher pays, du monde ou sans être taxés d’irréalisme ?
Il nous faut accepter ce malaise car il est révélateur de la réalité que nous vivons. Nous recevons en cette nuit sainte la promesse de Dieu annoncée par les anges aux bergers : « Paix sur la terre aux hommes que Dieu aime ! » (Lc 2, 14). Non seulement nous la recevons, mais nous croyons qu’elle est une parole authentique qui nous est destinée autant qu’aux bergers de Bethléem. Cette promesse n’est pas une sorte de formule magique qui effacerait comme par miracle toutes les difficultés de l’existence. Elle est une promesse qui nourrit notre espérance tout au long de l’histoire de l’humanité : Dieu aime les hommes et veut leur donner sa paix.
Et cette certitude nous confronte inévitablement à l’épreuve de la foi et à la question qui traverse toute la destinée des hommes : Comment croire à l’amour de Dieu pour l’humanité et à sa promesse de la paix quand nous sommes soumis à toute sorte d’épreuves par la vie ? Comment l’amour de Dieu est-il compatible avec la misère de l’humanité ? Or en cette sainte nuit, nous reconnaissons que le Dieu tout-puissant vient se manifester à l’humanité, non pas dans ce que nous savons de la puissance de nos nations, dont nous connaissons par ailleurs la fragilité, mais dans l’extrême faiblesse de cet « enfant nouveau-né couché dans une mangeoire. » (Lc 2, 16) Il se présente comme le Sauveur du monde, mais le salut qu’il apporte et qu’il réalise n’est pas l’écrasement des forces du mal par sa puissance. Il nous sauve non par une victoire spectaculaire sur les forces du mal mais par le don de sa vie qu’il fait dans l’amour.
Frères et sœurs, en cette nuit de Noël, je vous propose de méditer le texte que nous venons d’entendre dans la première lecture, celui du Prophète Isaïe.
La première partie du Livre d’Isaïe se situe au VIIIe siècle avant Jésus-Christ, à une époque où une grande puissance militaire menace Israël, en l’occurrence l’Assyrie, et la tentation est forte alors pour le roi d’Israël de faire des alliances militaires avec les pays environnants ou encore de recourir aux dieux païens pour s’appuyer sur leur puissance ; or, le message d’Isaïe est clair : appuyez-vous sur le Seigneur, il a l’air faible, mais en réalité il est fort et il apporte la Paix, il ressemble à un enfant, mais il est Dieu. Dans ce texte, Isaïe veut redonner l’espoir aux hommes de son temps en leur partageant sa confiance en Dieu.
Aujourd’hui, notre pays est très fragile comme le sont les situations de beaucoup d’entre nous : situations sécuritaires, familiales, économiques, affectives, santé, etc…Isaïe le sait et il commence par parler d’un peuple qui marche dans les ténèbres, d’un peuple qui ne sait pas où aller, il les appelle « les habitants du pays de l’ombre » et ce peuple voit se lever une lumière et cette lumière est pour eux source de joie et d’allégresse. Ils n’ont rien, ils ont tout perdu, mais ils se réjouissent dit Isaïe.
Cette joie vient de ce que leurs souffrances qui était comme une barre de fer attachée dans leurs dos, Dieu vient de la briser ; toutes leurs peurs, tous les signes de leur souffrance, Dieu vient de les brûler ! De quoi s’agit-il ? De fait, historiquement au VIIIe Siècle avant Jésus-Christ, nous savons que le peuple d’Israël qui fuyait a continué de fuir et que l’Assyrie a fini par remporter la guerre et par asservir Israël.
Cette lumière dont parle Isaïe, ce n’est pas la victoire des armées. Mais qu’elle est cette joie, ce dépassement de la peur et de la souffrance ? C’est la naissance d’un petit enfant : « Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné (…) Son nom est Conseiller merveilleux, Dieu fort, Père à jamais, Prince de la Paix ». Isaïe vient leur montrer que Dieu dans la souffrance est là et qu’il apporte ce qu’apporte la naissance d’un enfant : l’espérance, la paix, le courage de vivre, l’amour.
Bien-aimés de Dieu, les paroles du prophète Isaïe ne vous parlent elles donc pas ce soir ? Ne vous semblent-elles pas écrites pour notre temps ? Pour notre pays le Burkina Faso ? Ne vous semblent donc-t-il pas, en les écoutant, que le prophète Isaïe a publié son oracle aujourd'hui sur les réseaux sociaux ? Ces paroles ne sont-elles pas puissance de Dieu pour nous ce soir ? De quoi donc notre pays a-t’il besoin en ce moment ? De quoi donc avons-nous besoin ? Est-ce d'un père Noël ou d'un sauveur ?
Oui, sachez-le, sur les habitants du pays de l'ombre des hommes intègre, une lumière à resplendit en cette nuit sainte ! Les manteaux des militaires couverts de sang, l’enfant-né les as tous brûlés ! Qu’il n’y est plus de ténèbres sur nous cette année nouvelle avec la naissance du prince de la paix ! Que plus de troubles, plus de drames collectifs ou personnels dans notre beau pays !
Dans cette nuit une lumière s'est levée. Dans notre pays déchiré, un sauveur nous est né. Et seule cette espérance est capable de nous tenir debout devant les drames de la vie et de notre société. En vérité tel est le vrai sens de l’éclat de la lumière de cette nuit que nous contemplons tous dans ce séminaire et dans les rues de la ville de Ouaga ! Lumières dans la nuit. Beauté d'un autre monde venant transformer et illuminer un monde souffrant.
En effet, il y a dans le mystère de Noël que nous célébrons ensemble ce soir, une espérance puissante, la plus puissante des espérances, et à vrai dire, la seule espérance qui tienne face aux désordres de nos vies et du monde, face aux marées montantes du malheur et face à notre fragilité : C’est l’enfant Jésus, le Prince de la paix. Voilà donc, l’unique cadeau que Dieu nous donne et que nous fêtons et célébrons ce soir.
Oui, Noël, c’est aussi la fête des cadeaux ! Mais combien savent la raison de cette coutume ? C’est parce que Dieu, le premier, nous a offert un cadeau. Ou plutôt, c’est parce que Dieu s’est donné à nous en cadeau. Un cadeau tellement précieux, que nous n’aurons jamais fini d’en découvrir la valeur, de nous en émerveiller et d’en vivre. Car, ce que nous célébrons à chaque Noël n’est pas une histoire du passé. C’est prodigieusement actuel. Aujourd’hui Dieu se donne à nous en Jésus. Dieu s’offre à nous comme un petit, un pauvre, pour nous faire découvrir qu’il est bien réellement là, avec nous, dans la fragilité de l’existence humaine, dans les joies les plus intenses, comme dans les circonstances les plus difficiles de nos vies.
Un grand et beau cadeau qui porte en lui la joie. Oui, pour tous ceux qui, sans calcul, prennent le risque d’accueillir en eux cet enfant et de vivre en cohérence avec son évangile de l’Amour, est promis une joie que le monde est incapable de comprendre ou même d’imaginer. « Ne craignez pas, dit l’ange aux bergers, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : aujourd’hui vous est né un Sauveur. »
Frères et Sœurs, réjouissons-nous ! Le Seigneur est avec nous pour toujours. Nous sommes les bénis de Dieu. Voilà ce que fait l’amour invincible du Seigneur de l’Univers ! Que cette foi puissante qui nous a mystérieusement réunis ce soir et qui nous a mis en route cette nuit nous éclaire et nous accompagne tout au long de l'année qui vient !
Laissons-nous aussi emporter en cette nuit, par la joie de la Nativité en acceptant d’entrer avec Jésus dans une vie de partage qui va au plus près de ceux qui souffrent. Que la faiblesse de l’enfant nouveau-né soit pour nous une source de force et de persévérance, une source de paix, de fraternité et de joie. C’est cette grâce que je souhaite à tous, afin qu’en cette année, la fête de la Nativité soit encore plus belle pour chacun de nous.
Que par cette Eucharistie, le Seigneur fasse de nos cœurs des crèches vivantes qui accueillent l’Enfant-Sauveur pour le donner sans cesse au monde. Demandons cette grâce au Dieu qui est, qui était et qui vient pour les siècles, des siècles. Amen
Ab Damien OUEDRAOGO