L’amour est le but ultime de la vie ! Homélie du 30ème dimanche du T.O

Publié le par Grand Séminaire Saint Jean-Baptiste de Wayalghin

L’amour est le but ultime de la vie ! Homélie du 30ème dimanche du T.O

Dimanche 25 octobre 2020

Textes du jour : Ex 22, 20-26 ; Ps 17 ; 1Th 1, 5c-10 ; Mt 22, 34-40 ; St Crépin

 

Aimer Dieu et aimer les hommes, voilà tout ! L’amour est le but ultime de la vie !

Chers frères en Christ, les textes liturgiques de ce 30ème Dimanche du temps ordinaire nous affirment que la synthèse de toute l’Ecriture : c’est l’amour ; l’amour de Dieu et celui du prochain. L’amour est pour ainsi dire, la loi fondamentale du peuple de Dieu.

De fait, l’amour est le fil d’Ariane qui traverse les lectures bibliques de ce jour. Partant du Code de l’Alliance avec les commandements : « tu n’opprimeras pas l’immigré, tu n’accableras pas la veuve, l’orphelin et le pauvre » ; passant par la confession chaleureuse du psalmiste : « je t’aime Seigneur » et le bel exemple de l’abandon des idoles par les Thessaloniciens pour servir le Dieu vivant, nous aboutissons à l’affirmation impérative de Jésus dans l’évangile : « tu aimeras Dieu de tout ton cœur, et tu aimeras ton prochain comme toi-même ».

« Aimer », « amour », voilà des termes qui nous sont familiers et bien ordinaires. Nous donnons le nom « amour » à des réalités diverses : charnelles ou spirituelles, passionnelles ou réfléchies, épanouissantes et même destructrices. Ces réalités diverses, peuvent être cernées sous divers angles mais intéressons-nous ici à l’acception biblique de l’amour. Précisons d’emblée qu’il ne s’agit pas des jeux de l’affectivité et du sentiment qui ne sont pas de l’ordre du commandement mais de la justice concrète et de la miséricorde. Dans le Nouveau comme dans l’Ancien Testament, l’amour de l’homme a une double dimension : la dimension verticale qui consiste en l’amour de Dieu et la dimension horizontale qui consiste en l’amour du prochain. Telle est la synthèse de la Loi et des Prophètes. Mais en quoi consiste chaque dimension de cet amour ?

(Dimension verticale) L’amour de Dieu, qui correspond à la dimension verticale de l’amour est une réponse de l’homme à Dieu qui l’a aimé en premier, il s’agit là d’un dialogue d’amour. Cet amour pour Dieu s’exprime d’abord en actes d’adoration et d’obéissance, il s’exprime par la fidélité et la crainte de Dieu, par l’attachement à son Nom et à sa Loi. On pourrait se référer aux trois termes chers à Osée, le prophète de l’amour. Il traduit la relation juste à Dieu par la « Emet » = fidélité, vérité, la loyauté, la constance dans la relation à Dieu ; la « Hesed » = miséricorde, l’amour gratuit ; et la « Yada » = connaissance dans son aspect cognitif mais surtout dans le sens de l’intimité et de la relation spéciale avec Dieu. Aussi, l’amour de Dieu est la foi au Fils unique Jésus Christ. Cet amour est accueil du Verbe fait cher et renoncement aux idoles comme l’ont fait les Thessaloniciens dont Paul admire l’exemple dans la deuxième lecture. L’amour de Dieu se vit au quotidien et doit souvent se prouver par le martyre : pensons aux Maccabées, aux nombreux martyrs de l’Eglise primitive et aux martyrs d’aujourd’hui. La radicalité et l’exclusivité sont les caractères essentiels de l’amour de l’homme pour Dieu. Le Décalogue affirme bien ce caractère : « tu n’auras pas chez toi d’autres dieux » (Ex 20, 3). De même, Jésus insiste sur le caractère total de l’amour de Dieu lorsqu’il demande d’aimer le Seigneur « de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit ». L’amour pour Dieu est le premier commandement, le plus grand, telle est la réponse donnée par Jésus aux pharisiens. A ce commandement est rattaché un autre, dont nous trouvons déjà la formulation dans le Lévitique : « tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lv 19, 18 ; Mt 22, 39).

 (Dimension horizontale) L’amour dans sa dimension horizontale nous ouvre au prochain, il est attention, respect et compassion envers autrui, surtout les pauvres et les petits. La première lecture focalise, de ce fait, notre attention sur les « anawim = les pauvres », envers qui nous devons faire preuve de justice et de miséricorde. Nous sommes invités à vivre concrètement l’option préférentielle pour les pauvres : « tu n’opprimeras pas l’immigré, tu n’accableras pas la veuve et l’orphelin ; tu n’imposeras pas d’intérêt quand tu prêtes au pauvre, tu remettras l’unique manteau pris en gage quand vient le soir ». A travers ces interdictions de nuire à autrui, l’amour du prochain se révèle être une protection et une promotion de la vie d’autrui. Car, il ne suffit pas de ne pas faire du mal à autrui, l’amour du prochain est aussi l’injonction de lui faire du bien. Le motif du commandement de l’amour du prochain n’est pas une simple solidarité naturelle, ce n’est pas par simple philanthropie, mais c’est à cause de l’histoire du salut même, Israël doit se souvenir de ses souffrances en Egypte et ainsi renoncer à toute maltraitance des étrangers et des faibles. Cette motivation nous fait penser à la règle d’or de la conduite humaine dans sa formulation négative : « ne fais pas à autrui, ce que tu ne veux pas qu’on te fasse », tandis que dans l’évangile, l’expression « comme toi-même » qui se rattache à l’affirmation « tu aimeras ton prochain », nous ramène à cette même règle dans sa formulation positive. L’amour du prochain est un amour universel qui va jusqu’à intégrer l’ennemi (Lv 23, 1-9 ; Lc 6, 35). La compassion devant la souffrance des humiliés demandée à l’homme, prend exemple sur la compassion de Dieu, qui écoute et protège le faible. Cette compassion divine fait exulter le psalmiste qui confesse son amour : « je t’aime Seigneur mon rocher ».

(Indissociabilité de l’amour de Dieu et du prochain) Les commandements d’aimer Dieu et le prochain, sont indissociables, ils ont un lien intrinsèque. « Celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, comment peut-il aimer Dieu qu’il ne voit pas ? » nous demande Saint Jean (1Jn 4, 20). De la même manière, on peut se demander d’où notre amour pour le prochain tirera-t-il sa source et sa force, si nous rejetons Dieu qui est Amour. En réalité, l’amour pour l’homme sans celui de Dieu finit par manquer d’ardeur et de raison d’être, de même, l’amour pour Dieu qui ne s’incarne pas dans l’amour du prochain n’est qu’égarement et fanatisme. Celui qui aime Dieu, aime ses frères puisque Dieu aime la miséricorde plus que les sacrifices et celui qui aime véritablement ses frères tient cet amour de Dieu qu’il ne peut rejeter. L’amour de Dieu et du prochain est don de soi à Dieu et aux hommes, il est aussi communion à la vie divine et communion avec les autres. Ce don et cette communion impliquent le pardon sans limite, la patience, le bien rendu pour le mal, le renoncement à soi. Mais nos vies ne sont-elles pas bien souvent en déphasage avec ce double commandement de l’amour ?

(Manquements au double commandement de l’amour et nécessité d’une conversion) L’appel à l’amour de Dieu et du prochain que font résonner les textes liturgiques de ce jour est un appel pressant à reconnaitre nos limites d’une part et à prendre le chemin de la conversion d’autre part. De fait, si l’observation de la vie quotidienne nous donne des exemples courageux de don de soi à Dieu, de sacrifices et d’engagement pour les pauvres, on ne peut se voiler la face devant les offenses au double commandement de l’amour.

Tout d’abord, s’agissant des manquements au commandement d’aimer Dieu, référons-nous aux différentes formes de négation et d’opposition ouvertes ou dissimulées à Dieu que nous relate l’histoire : les idéologies athées, l’indifférence religieuse, sans compter nos infidélités et nos révoltes contre Dieu qui sont presque quotidiennes. Pensons aussi aux divers fanatismes et extrémismes qui ont endeuillé et continuent d’endeuiller tant de populations, considérons les fausses mystiques qui asservissent l’homme. Pensons surtout aux idoles qui nous empêchent de façon personnelle d’être en communion avec Dieu et de nous donner à Lui.

Les violations du commandement d’aimer le prochain sont tout aussi visibles : les injustices sont monnaie courante, l’actualité nous offre chaque jour des exemples de stigmatisation, de rejet et de mépris de l’immigré, de l’étranger et du déplacé, l’indifférence au sort de la veuve, de l’orphelin et des sans défense qu’on exploite et maltraite, l’oubli et la mise à l’écart des plus pauvres, les systèmes de prêts et les accords économiques compromettant les espoirs d’épanouissement des générations futures dans les pays du Sud, etc.

Bien aimés de Dieu, toutes ces situations d’infidélité à Dieu et d’injustice faite aux autres, nous interpellent et nous invitent à la conversion collective et individuelle. En effet, nous sommes responsables devant Dieu de nos refus d’aimer, de notre inconstance dans la relation à Dieu, de notre silence ou de notre inaction devant les injustices. Dans nos vies, peut-être y a-t-il des idoles qui nous empêchent d’aimer et de servir le Dieu vivant et que nous devons abandonner. Peut-être devons-nous aussi réprimer notre orgueil qui assèche nos cœurs et les ferme aux autres. Peut-être devons-nous former et éveiller nos consciences pour dénoncer et lutter contre les injustices. Il revient à chacun d’identifier les efforts à faire pour instaurer un dialogue filial avec Dieu et pour être juste et miséricordieux envers ses frères. En la matière, suivons l’exemple de Jésus, en lui, nous avons la révélation de l’amour parfait de Dieu et du prochain, il réalise le dialogue filial parfait avec Dieu son Père à qui Il est totalement soumis, et son amour pour l’homme est total en témoignent sa pro-existence et le don de sa vie.

« Tu aimeras Dieu de tout ton cœur et tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Puisque l’amour est un don surnaturel de Dieu et une œuvre de l’Esprit Saint dans nos cœurs, demandons que ce sacrifice d’amour du Christ que nous célébrons, fortifie notre amour de Dieu et nous rende compatissants et miséricordieux les uns envers les autres. Puisse Dieu nous écouter et nous exaucer. Amen !

 

Christophe Ouédraogo,

Diacre

Publié dans Homélies dominicales

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