 La Présentation, une école de rencontres fécondes et de don de soi/Homélie du 4ème Dimanche du Temps Ordinaire

Publié le par Grand Séminaire Wayaghin

	La Présentation, une école de rencontres fécondes et de don de soi/Homélie du 4ème Dimanche du Temps Ordinaire

Ml 3, 1-4 ; Ps 23 ;  He 2,14-18 ;  Lc 2, 22-40

          Frères et sœurs en Christ, quarante jours après Noël, l’Eglise nous offre l’opportunité de méditer et de célébrer l’un des évènements les plus importants de l’enfance de Jésus : la Présentation au Temple, fête qui clôture les solennités de l’Incarnation. L’évangéliste Luc précise qu’« ils portèrent l’enfant à Jérusalem pour le présenter au Seigneur » (Lc 2, 22). Cette pieuse démarche de Marie et de Joseph est marquée par deux moments essentiels qui, d’un commun accord dégagent un caractère à la fois révélateur et interpellateur capable de fortifier et d’édifier notre relation à Dieu : le premier moment est fondamentalement rituel. Le second moment est celui de la rencontre des parents de Jésus avec Syméon.  Mais avant d’aborder ces deux moments, il s’avère primordial de cerner et de considérer l’origine et le sens de cet évènement.

  • Origine biblique de la Présentation au Temple

Frères et sœurs, la Présentation au Temple est une démarche de foi qui a indubitablement ses sources dans les écrits vétérotestamentaires. En effet, nous lisons ceci dans le livre de l’Exode : quand le Seigneur t’aura fait entrer dans le pays des Cananéens, comme il te l’a juré ainsi qu’à tes pères, et qu’il te l’aura donné, tu cèderas au Seigneur tout être sorti le premier du sein maternel (…), Ex 13, 11-13. Cette exigence divine vise, non seulement à entrainer les fils d’Israël à la reconnaissance envers le Dieu qui l’a libéré de l’esclavage d’Egypte, mais aussi, pour qu’au fil des âges, ce peuple lui soit toujours consacré. Ainsi, pour le peuple élu, tout premier né est d’une importance capitale. Car il est non seulement la mémoire des hauts faits de Dieu dans la famille mais aussi, sur lui repose l’espoir et l’espérance de la survie spirituelle et de la moralité du peuple. Consacrer ou présenter donc le premier né au Seigneur revient à faire de lui un intermédiaire et un serviteur agréable à Dieu. Il saura, en vertu de la bénédiction et du soutien du Dieu de ses Pères, faire valoir la tradition de ses ancêtres et garantir une saine connaissance de la Loi à tous les membres de la race élue. L’acte de piété de Joseph et de Marie est donc l’accomplissement de cette prescription consignée dans le Pentateuque.

  • Le premier moment de la Présentation : la purification rituelle et la consécration de l’Enfant

Au-delà d’une simple obéissance à une prescription cultuelle ou à un rituel traditionnel, la présentation de Jésus est tout à fait originale. Cette originalité se cache d’une part dans la divinité de l’Enfant et d’autre part dans la maternité virginale de sa Mère, Marie. Cependant, malgré ce privilège qui lui est accordé, Marie ne se dérobe pas à cette règle traditionnelle. Elle l’accomplit au contraire avec entière piété. Avant de consacrer son enfant, elle accomplit avec humilité le rite de purification selon la prescription du Lévitique : quand sera achevée la période de purification, que ce soit pour un garçon ou pour une fille, elle (la femme) apportera au prêtre, à l’entrée de la Tente du Rendez-vous, un pigeon ou une tourterelle en sacrifice. Le prêtre l’offrira devant Yahvé, accomplira sur elle le rite d’expiation et elle sera purifiée de son flux de sang (Lv 12, 6-7).  La femme qui enfante devrait en effet, par certains rites, rétablir son intégrité et ainsi son union avec le Dieu source de vie. En observant cette règle, Marie se dispose à présenter son Fils en agréable offrande au Seigneur.

Après le rite de purification Marie et Joseph offrent en sacrifice les animaux choisis et, simultanément, présentent le plus précieux de leur famille au Dieu qui est le principe de la vie et qui leur a fait don de l’Emmanuel. C’est là le parfait acte de reconnaissance qu’ils manifestent envers le Seigneur qui dans sa bienveillance leur a fait grâce, de façon miraculeuse, d’un Nouveau-né qui est le Sauveur d’Israël. De fait, ils ont compris que cet Enfant qui est d’origine divine est d’office consacré à Dieu. Ils s’empressent donc de lui permettre d’obtenir toutes les faveurs et les grâces du Dieu d’Israël son Père afin de réussir parfaitement sa mission sur terre. Après la présentation du Fils à son Père, vient la rencontre avec le peuple en attente représenté par le vieillard Syméon.

  • Le second moment : la rencontre avec Syméon, moment d’exultation et de prophéties.

   Ce deuxième moment est plein d’émotions et il en jaillissent des révélations mémorables qui touchent la sensibilité des parents de Jésus, plus particulièrement Marie. Frères et sœurs, le Temple qui est le lieu où le Fils, le Verbe fait chair, est présenté à son Père se découvre aussi favorable pour une plus ample révélation du Christ aux hommes, et ce, afin de les ouvrir à une vie remplie de Dieu. Dieu est présent dans son Temple et l’homme doit y trouver les sources et les voies de sa sanctification. Soudain vint dans son temple le Seigneur que vous cherchez, prophétisait Malachie dans la première lecture. Toutefois cette prophétie ne voudrait aucunement signifier que la présence du Seigneur dans son Temple serait sporadique ou ponctuelle. Dieu y est constamment présent pour l’homme qui le cherche avec tout l’élan de son cœur. La présentation, c’est donc Dieu qui vient à la rencontre de l’homme pour se révéler pleinement à lui. Syméon est la figure du peuple d’Israël qui attend son Seigneur avec foi. Son attente laisse percevoir celle de l’homme pauvre et pécheur qui, perdu dans l’amertume de ses péchés n’attend que le secours de son Créateur.

Frères et sœurs, le vieillard Syméon exulte de joie à la vue de l’enfant Jésus. Pour Syméon, en effet, la longue attente du peuple d’Israël trouve son aboutissement dans ce petit Enfant qu’il reçoit dans ses mains. En tant que membre du peuple élu qui attendait la réalisation de la promesse de Dieu, toute sa  vie n’est qu’un moment d’attente de ce jour de rencontre avec le Seigneur. C’est pourquoi, l’Enfant dont l’identité lui est révélée par l’Esprit Saint constitue toute la finalité ultime de son existence terrestre. Plus rien ne saurait encore compter dans ses vieux jours. La vie sur terre n’a plus de sens puisqu’il a trouvé le sens de sa vie : le Christ qui lui ouvre la voie de la béatitude, c’est-à-dire, la grâce du repos éternel en Dieu. C’est ainsi qu’il exprime sa grande satisfaction en ces termes : maintenant Maitre Souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix selon ta parole, car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples, lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël.

Par ailleurs, l’Esprit Saint, s’emparant de Syméon, lui donne de mettre en exergue l’origine hautement divine et la mission du petit Enfant Jésus. Il s’adresse donc à Marie en ces termes : voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvent de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction, et toi, ton âme sera traversée par une épée ; ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre. De fait, la prophétie de Syméon nous révèle le Christ bien plus grand qu’un Fils ainé selon la conception humaine dont l’obéissance à la loi mosaïque sanctifierait. Il est le Grand Prêtre qui, solidaire de la condition de l’homme qu’il aime, se donne en victime propitiatoire afin de le rehabiller définitivement de sa dignité originelle perdue suite à son péché. L’auteur de la lettre aux hébreux affirme à cet effet qu’il a partagé notre condition humaine afin de réduire à l’impuissance celui qui possédait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable ; et il a rendu libres tous ceux qui, par crainte de la mort, passaient toute leur vie dans une situation d’esclavage.

Cependant, Syméon prévient les parents de Jésus que cet amour qui s’offre gratuitement à l’humanité par Jésus sera en bute à une dichotomie émanant de la conduite des hommes. Car, si pour les uns, le Christ est leur unique gloire, l’épée qui transpercera le cœur de Marie s’apparente à la tragédie du rejet de Jésus par les autres. Ce rejet atteindra son paroxysme sur la croix au Calvaire. L’Eglise perçoit à travers l’image de cette épée non seulement la douleur mortelle de la mère, mais aussi, elle évoque en même temps les textes prophétiques qui parlent de la douleur de la Communauté messianique au moment du jugement de Dieu. Ainsi, la figure de Marie en vient à représenter et à résumer le profil de la Communauté chrétienne, associée au refus et à la persécution de son Seigneur tout au long de l’histoire.  C’est pourquoi, tout baptisé est appelé à jouer pleinement sa partition dans l’aujourd’hui de cette Communauté chrétienne par un don de soi toujours renouvelé pour qu’elle demeure éternellement le lieu propice de rencontre des hommes de l’actuel monde mouvant avec Dieu, Maitre de Tout.

  • La Présentation, une école de rencontres fécondes et de don de soi

Jésus est présenté au Temple. Chers frères et sœurs, cette volonté ablative qui a motivé la démarche de Marie et Joseph est bien noble et digne d’imitation. Comme eux, nous devons à notre tour présenter au Seigneur ce que nous sommes et ce que nous avons de précieux. Dans cette perspective, notre vie tout entière doit être jalonnée par les étapes qui ont marqué le Présentation de Jésus au Temple. Elle doit en effet être une alternance féconde de purification, de consécration et de rencontre. L’Eglise nous offre tous les moyens qui facilitent cet enchainement à travers les sacrements et les différents ministères qui la composent. Notre rencontre avec le Seigneur doit y trouver des recommencements qui orientent toute altérité avec nos semblables. C’est dans cette optique que prêtres, religieux, religieuses, consacrés et laïcs présenteront leurs personnes en offrande agréable au Seigneur au profit du monde. Chacun présente, dans la logique d’un don de soi toujours dynamique sa vie à Dieu, ce qui l’ouvre à des rencontres fécondes où la charité sera toujours inventive et concrète envers ses frères.

L’être tout entier du chrétien doit être une perpétuelle offrande au Seigneur. Et l’offrande volontaire et délibérée de notre vie au Seigneur doit s’exprimer dans un témoignage de vie authentiquement chrétienne, une vie disposée à servir les autres dans la miséricorde et l’amour qui la rendent agréable. L’apôtre Paul nous y encourage en ces termes : je vous exhorte donc frères, par la miséricorde de Dieu, à lui offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, saint, capable de lui plaire : c’est là le culte spirituel que vous avez à rendre (Rm 12, 1).

Que notre rencontre de ce jour avec le Seigneur nous fortifie et fasse de nos personnes une offrande agréable au service de son Eglise. Que la célébration du Saint Sacrifice de son Fils nous y aide, amen !

 

                                                        Abbé Francis CONOMBO, Diacre

Publié dans Homélies

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