La vertu de charité, chemin vers Pâques

Publié le par Grand Séminaire Wayaghin

        A mi-parcours de notre montée vers Pâques, entrons au plus profond de nous-mêmes et demandons-nous où va notre chemin ? Suit-il les traces du Condamné ? Est-il celui de l’amour de Dieu et du prochain ? Aimer Dieu par-dessus tout et aimer son frère comme soi-même, voilà l’essentiel de la loi.

 

          Amour et Charité ou Charité et Amour se complètent-ils ou au contraire s’excluent-ils ou s’éclairent-ils mutuellement comme concepts théologiques ? Loin d’être nouvelle, cette question renvoie de prime abord à des traités conclusifs divergents. Pendant que certains affirment sans ambages que la Charité est égale à l’Amour, d’autres s’évertuent à les différencier dans la profondeur de leur sens théologique. Le but de ce propos qui s’annonce n’est cependant pas de reprendre et d’exposer les termes de ce débat essentiel, mais de permettre une prise de position sur une question qui engage ; en définitive au-delà de ces querelles conjoncturelles, ne remarquons-nous pas que Charité et Amour sont deux manières de parler de l’homme en relation avec autrui et Dieu ; deux types de discours théologiques ayant pour acteurs principaux : Dieu et l’homme. De là, une impression transparait : un rapprochement immédiat, d’où la légitimité est de se demander s’il existe entre ces deux termes une différence profonde ou superficielle, vouloir les opposer ou différencier n’est-ce pas affadir leur sens théologique profond. Afin d’amorcer une telle discussion théologique, il est important, voire nécessaire de commencer par une définition claire des termes ou concepts, Charité et Amour : sans trop avoir la prétention de vous fournir un traité sans failles et objection aucune, tels sont le axes phares de notre travail.

I-    Approche conceptuelle

    La Charité
             Vertu théologale par laquelle nous aimons Dieu par-dessus toute chose pour lui-même, de façon gratuite et notre prochain comme nous-mêmes pour l’amour de Dieu. C’est un acte inspiré par l’amour de Dieu et du prochain. De là, soulignons le fait que la Charité soit un acte que l’on pose pour donner réponse à l’amour de Dieu car si nous progressons dans la réflexion, nous remarquons qu’avec certains de nos devanciers  sur le chemin de la foi comme les saints Bernard de Clairvaux, Richard de Saint-Victor et Guillaume de Saint-Thierry, la Charité s’expérimente, elle est concrète et se concrétise par des œuvres de miséricorde, d’où pour eux la Charité consistait : à nourrir les affamés, désaltérer les assoiffés, vêtir les démunis, soigner les malades, visiter les prisonniers et enterrer les morts comme le veut l’Evangile, d’où la Charité pour la définir, est cet amour « envers Dieu » mais amour « avec Dieu ». Dans la Charité, il y a donc l’amour qui monte vers Dieu et l’amour qui descend vers les frères. Disons, en définitive, que la Charité est cette manifestation concrète par les œuvres qui constitue l’élément fondamental du chrétien, son outil, un moyen noble de participer au  très Grand Mystère de l’Amour trinitaire ; d’où la très belle exaltation de la Charité par Saint Paul en 1Co 13 : « la Charité est patiente, serviable, n’est pas jalouse, ne se vante pas, ne s’enfle pas d’orgueil, elle n’est pas malhonnête, elle ne tient pas compte du mal…Elle excuse tout ; elle croit tout ; espère tout,… »  Au-delà de toutes ces bonnes œuvres qui manifestent la Charité, osons dire que l’Amour dépasse de très loin toutes ces considérations car la Charité est un acte d’amour qu’on pose alors que l’Amour c’est Dieu Lui-même.

    L’Amour
            Parler de l’Amour au sens théologique, religieux, revient à parler de Dieu car Lui seul est vraiment Amour et peut vraiment nous  introduire  dans ce très Saint Grand Mystère de l’Amour. Disons qu’aucun regard humain ne peut fixer ce sommet de l’Amour qui baigne de la lumière de Dieu : un Amour dépouillé et oblatif ; c’est dans cet Océan aux dimensions immenses de l’Amour de Dieu que notre amour pour Dieu et pour l’homme se comprend. A l’Amour de Dieu pour nous, nous devons répondre par l’Amour. Dès lors « nous voyons et prenons conscience qu’aimer vraiment, c’est devenir un espace illimité où Dieu respire, où tout être est accueilli, où toute enfance peut trouver son berceau » . De là, l’Amour devient ce dépouillement qu’il faut sans cesse renouveler, cette libération qu’il faut à chaque instant reconquérir et cela n’est possible que par l’acte de la Charité, d’où l’on peut se rendre à l’évidence que l’Amour devient Charité (Caritas) que lorsqu’il est Vertu, cette Vertu qui rend pleine et plénière toute la Loi que Jésus nous a révélée. Notons « qu’avant tout par son ontologie personnelle, Jésus par ce qui constitue son  être propre que la plus haute forme d’existence, est dépouillement, désappropriation oblative, que la seule liberté efficace est générosité, amour, don de soi, que l’on se trouve en se quittant et que toute réalité se transforme dans l’offrande qui l’assume sans se l’approprier » . Notons cependant que malgré la légère différence qui existe entre ces termes, il y a une relation intrinsèque qui unit Amour et Charité, d’où notre dernier point qui est la synthèse qui expose en effet que Charité et Amour ne sont que deux manières de parler de l’homme.

II-    Amour et Charité : une seule réalité
             Après avoir défini l’Amour et la Charité au sens religieux et chrétien, une impression se dégage et se définit : celle de voir que Amour et Charité sont une même réalité, d’où l’affirmation Amour et Charité se justifient. En effet, disons que dans la Charité, il y a l’Amour qui monte vers Dieu et l’Amour qui descend vers les frères, c’est le double battement du cœur, la condition même de la vie. De là, nous voyons que parler d’Amour, c’est parler de Charité vice-versa, d’où l’affirmation : Dieu est Charité, Dieu est Amour. C’est ainsi que nos actes de respect pour le prochain, la pratique du bien à l’égard de tous, nos pardons des offenses et nos réconciliations spontanées nos échanges mutuels et nos rencontres fraternelles, notre douceur, sympathie, patience, bonté, disponibilité et hospitalité, notre sourire, notre parole d’amitié et de réconfort ne sont que la manifestation de notre amour pour Dieu et pour le prochain. Partant de là, nous pouvons dire que l’Amour, le plus grand commandement, est un pur don de Dieu et la Charité, le tremplin, le moyen, l’acte par lequel nous  concrétisons cet Amour de Dieu, nous entretenons cette graine de l’Amour semée dans la fine terre fertile de notre être, appelée à croître, d’où l’exigence pour nous de toujours faire éclore des centres de charité où l’on observera le grand commandement de l’Amour de Dieu envers Dieu et de la Charité envers les frères ; c’est pourquoi notre Amour ne sera une réalité que lorsque notre charité sera agissante, concrète, palpable, c’est-à-dire des exercices répétés d’actes de charité. Pour finir, disons que la Charité est à la fois l’Amour que Dieu donne à l’homme et l’accueil de cet Amour par l’homme. C’est cet accueil qui le transforme, le sort de lui-même et des miroirs qu’il s’offre, l’extirpe de sa volonté de tout ramener à lui, lui fait découvrir sa véritable nature qui est d’aimer gratuitement. D’où l’affirmation suivante : l’Amour, c’est aussi la Charité lorsqu’il englobe tous les aspects de l’Amour qui les pousse à  leur perfection : le bonheur.


           Puisse le Seigneur nous éclairer toujours afin que durant le reste de ce temps de carême et tout au long de notre vie, nous cultivions en nous l’amour de Dieu et celui de nos frères. Chers amis, chers frères « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ».

                        

Travail réalisé par Anselme ZABRE
Mise en forme : Martial SAOUADOGO

 

 

La vertu de charité, chemin vers Pâques
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article